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14 novembre 2011

Rocard en flagrant délit de manipulation oratoire

Alors que Michel Rocard avait la réputation d’être un politicien de haute volée intellectuelle, voici qu’il nous donne un condensé de discours hautain, simpliste et un brin manipulateur (cf son interview du 13 novembre rapportée par Le Monde.fr).

« Vouloir attenter au nucléaire est une folie" (…) Je souhaite profondément que les Verts comprennent : nous sommes entrés dans le pic pétrolier, dans 7 ou 8 ans, il y aura une diminution frénétique" des ressources pétrolières, a mis en garde M. Rocard. "Le charbon tue beaucoup plus de gens", a-t-il affirmé, ajoutant que "le nucléaire est beaucoup moins dangereux que l'on ne le saurait". "Il nous faut retrouver sur le nucléaire de la sérénité", a fait valoir l'ancien premier ministre.

« Vouloir attenter au nucléaire est une folie » : Le ton est donné. Ceux qui ne pensent pas comme Rocard sont fous. Il s’agit d’un crime. Accordons un mérite à cette entame : elle devrait alerter le lecteur sur l’intention ou l’état d’esprit de Rocard : il va nous donner son sentiment en jouant sur nos sentiments. Mais nous écoutons un homme politique réputé expérimenté et sérieux, et nous lisons ses propos sur un journal réputé « de référence ». Alors, écoutons la suite.

 

Rocard souhaite que « les Verts comprennent » : il ne s’agit donc pas d’un désaccord, mais, selon Rocard, d’un écart entre lui qui sait, qui a compris, et les Verts qui ne savent pas. Quel mépris ! Voilà notre grand homme qui nous fait le coup de la pédagogie : il faut expliquer au peuple (…) et il comprendra. Si on écarte l’interprétation « du mépris », il reste la manipulation : « il faut comprendre que …. » est un procédé oratoire qui consiste à nier qu’il puisse y avoir débat, à nier le point de vue de l’interlocuteur.

 

« Il y aura une diminution frénétique (…) » : pourquoi cet adjectif de frénétique qui contraste avec la neutralité de « dans 7 ou 8 ans » ? En l’état actuel des connaissances, la formule « nous sommes entrés dans le pic pétrolier » est juste (pour préciser l’année exacte, il faudrait se lancer dans une analyse fine des statistiques),  mais je ne vois pas sur quoi se fonde ce mot de frénétique. Il s’agit donc là d’un adjectif dont la finalité est de provoquer une émotion, en alertant sur l’urgence, la dimension dramatique de la diminution à venir des ressources pétrolières.

 

« Le charbon tue beaucoup plus de gens » : argument ressassé, c’est une affirmation sans doute exacte au vu des victimes directes et connues. On pourrait débattre en intégrant les victimes à long terme des accidents nucléaires ou chez les sous-traitants mal protégés. Mais le problème n’est pas là et je présume que Rocard le sait bien. Les opposants au nucléaire ne contestent pas les victimes nombreuses provoquées par l’utilisation du charbon (accidents dans les mines + pollution de l’air). Mais ils placent la réflexion sur d’autres plans que Rocard ignore superbement, par exemple : les risques en cas de catastrophe majeure, les risques liés à la dissémination, les risques sur le long terme suite aux difficultés à gérer les déchets nucléaires.

 

« Le nucléaire est beaucoup moins dangereux … » : affirmation gratuite. Déjà, il aurait fallu préciser dans quelles circonstances se situe ce propos : en France avec nos procédures de sécurité ? ou bien dans un pays en proie à une guerre civile et à une déliquescence complète de son système économique et social ? Le propos de Rocard est faux si on utilise rigoureusement le mot « danger » qui signifie « dommage potentiel ». Rocard confond le danger et le risque, or la distinction entre ces deux notions est fondamentale dans toute démarche de prévention.

 

« Il nous faut retrouver de la sérénité » : le propos est ambigu. Si Rocard sous-entend qu’il n’y a pas de sérénité dans le débat, il fait un mauvais procès à ses interlocuteurs anti-nucléaires qui ont, en fait, muri leur réflexion depuis des années. Si Rocard veut dire qu’il faut être serein vis-à-vis de l’énergie nucléaire, le propos est protecteur, un brin moraliste, en signifiant « soyez tranquille ».

 

En conclusion, j’entends Rocard nous dire « dormez en paix braves gens », mais, là, je réagis avec émotion car je ne reste pas serein vis-à-vis des responsables politiques qui abusent de leur autorité avec des discours qui manquent de rigueur intellectuelle.

 

Francis Odier, 14 novembre 2011

13 juin 2011

Efficacité de la réhabilitation thermique - comparaison de deux opérations à Crolles

En mars et mai 2011, le conseil municipal de Crolles a voté deux opérations de réhabilitation thermique pour des logements sociaux. La comparaison de ces deux opérations est édifiante : l'une est performante, l'autre non. 

 

Voir la comparaison - et simuler le délai de retour sur investissement en fonction du prix de l'électricité : Comparaison deux opérations de réhabilitation thermque- Crolles 2011.xls   

En supposant que le prix de l'électricité passe à 0,25 €/kWh, ce qui reviendrait à tripler le prix actuel, le délai de retour sur investissement serait de 63 ans pour l'opération des Charmanches (votée en mars 2011) et de 12 ans pour les Ardillais (vote en mai 2011). Bien sûr, les configurations architecturales ne sont pas identiques. Les bâtiments des Ardillais sont plus compacts et plus faciles à isoler.

 

Je fais l'hypothèse suivante : si les deux opérations avaient été présentées simultanément au conseil municipal, avec une étude comparative des gains énergétiques, le conseil aurait retoqué l'opération des Charmanches, non pour y renoncer, mais pour demander que le dossier soit réétudié. Même conclusion si l'opération des Charmanches avait été proposée au vote après celle des Ardillais : la "performance" de la réhabilitation aurait posé question au vu de ce qu'il est possible de faire.

Or, lorsque l'opération des Charmanches a été mise en délibération, les conseillers n'avaient pas de repères quantitatifs pour apprécier l'efficacité de l'opération. Résultat : la délibération s'est faite en aveugle, quasi sans débat.

Lorsque j'ai indiqué au conseil que le délai de retour sur investissement était anormalement long (supérieur à 100 ans), le maire a répondu : "c'est avec ce type de calcul que l'on ne fait rien", ce qui était une bonne manière d'éluder la question.

Je pense pourtant que l'on doit toujours se poser la question de l'efficacité de la dépense publique, surtout si on souhaite, comme moi, que chacun puisse apprécier par lui-même la pertinence des décisions prises par les élus.

13 mars 2011

Pollution de l'air dans le Grésivaudan

Plusieurs épisodes pollués cet hiver ... Chaque jour sec, nous avons quelque part dans la vallée ou sur les balcons de Belledonne ou Chartreuse des feux de broussailles visibles à des kilomètres. Il est temps d'alerter sur la pollution de l'air, et ce n'est pas qu'une affaire de transports !
 
Un feu dans la cheminée, c'est sympa ... mais ça pollue bougrement ! A allumer avec modération. D'où la chronique pour le journal municipal d'avril.
  
 Alerte à la pollution de l’air

Les particules fines figurent parmi les polluants atmosphériques les plus nocifs pour la santé. Les normes actuelles en France prévoient un seuil d’information à 50 µg par m3 et un seuil d’alerte à 80 µg/m3.

Les relevés effectués à Crolles (site Est Grésivaudan de l’ASCOPARG, ASsociation pour le COntrôle et la Préservation de l'Air en Région Grenobloise) montrent que le seuil d’information a été franchi à plusieurs reprises cet hiver. Nous avons eu deux épisodes significatifs de pollution : du 25 janvier au 4 février et du 2 au 8 mars.

 

Une étude européenne publiée récemment (communiqué de l’Institut National de Veille Sanitaire, 2 mars 2011) confirme le lien entre pollution et maladies respiratoires et conclut que la pollution de l’air dans les grandes villes a un impact direct sur l’espérance de vie.

 

En France, la combustion du bois est la première source de particules émises dans l'air, notamment les particules fines. Les transports (via les moteurs à explosion) ne contribuent qu'à 14 % des émissions de particules fines en France … mais cette part atteint des taux de 40 à 70 % dans certaines agglomérations [Source : Ministère du Développement Durable]. Les particules les plus fines (< 2,5 µg) sont les plus nocives. Elles sont essentiellement émises par les véhicules diesel.

Dans le Grésivaudan, chacun peut observer la pollution induite par les feux de broussailles, qui sont pourtant interdits. Certains de ces feux proviennent de professionnels, notamment d’entreprises de travaux publics ou d’entretien, ce qui est vraiment scandaleux. Les habitants qui se chauffent au bois doivent aussi être très vigilants sur la qualité de la combustion. Mieux vaut un poêle ou une chaudière à bois qu’une cheminée qui tire mal. L’information de la population ne suffisant pas, sans doute faudrait-il que les polices municipales prennent plus souvent l’initiative d’aller demander aux bruleurs – pollueurs de trouver d’autres méthodes pour traiter leurs déchets végétaux.

Concernant les particules fines émises par les véhicules … c’est un sujet déjà abordé dans cette chronique : cf l’urbanisme qui devrait être conçu pour limiter la demande de transport en voiture individuelle, cf le développement de la mobilité douce et de l’offre de transports en commun etc etc.

Ce qu’il faudrait faire pour améliorer la qualité de l’air est connu, à nous d’être attentifs à ce que les décisions des collectivités locales aillent bien ce sens.

14 mars 2011,

Documents de référence :
- le plan particules du ministère Développement Durable. Expose le problème et préconise ce qu'il faudrait faire :  plan_particules_complet MEEDDM - juillet 2010.pdf
- une étude européenne qui tire la sonnette d'alarme. Voir en particulier les estimations de perte d'espérance de vie dans les grandes villes européennes : Aphekom_summary_report 2011.pdf L'étude a été coordonnée par l'INVS, Institut National de Veille Sanitaire. Voir son communiqué du 2 mars 2011
 
Nous avons une station de mesure de l'ASCOPARG à Crolles - à côté de la salle Boris Vian. Les relevés proviennent de : www.atmo-rhonealpes.org.
Voir les données sources avec les 4 polluants mesurés  Air Crolles particules fines janvier mars 2011.xlsx
 

28 juillet 2010

Pour une approche industrielle du développement durable

A Toulouse, Airbus solarise sa nouvelle usine de montage de l'A350 : 22.000 m2 de panneaux photovoltaïques (PV), soit la moitié du hall de montage. La centrale injectera sur le réseau l'équivalent de la moitié de la consommation de l'usine.

Perpignan a engagé la couverture du marché Saint Charles : 70.000 m2 de tuiles solaires, la plus importante installation de capteurs solaires intégrés au bâtiment en Europe.

Grenoble a fait un « appel à projets pour couvrir le toit d’Alpexpo de panneaux photovoltaïques sur une surface de 30.000 m2 » (le DL du 13 juillet).

A Crolles, les élus restent frileux sur l’énergie solaire. La couverture du gymnase Léo Lagrange est en cours (800 m2 de panneaux), mais aucun autre chantier n’est prévu. Pourtant, vu les délais de tels projets, il serait nécessaire de démarrer des études dès maintenant. Les surfaces disponibles sur la commune sont considérables et se comptent en hectares : parkings, grandes surfaces commerciales, bâtiments communaux …

Il faut insister là-dessus : en matière de production d’énergie, nous vivons une période transitoire, une véritable compétition est engagée entre les ressources substituables au pétrole. Depuis les années 1970, la France a misé principalement sur le nucléaire, secteur qui redémarre actuellement et redevient commercialement offensif (cf les projets d’EPR). Jusqu’à aujourd’hui, la Chine a privilégié le charbon, énergie très polluante mais qui est aussi en fort développement au niveau mondial. L’enjeu de la décennie actuelle, c’est le renouvellement et / ou le remplacement des moyens de production existants : l’avenir du nucléaire, du charbon, du pétrole offshore ou issu des schistes bitumineux et des énergies renouvelables, c’est le même sujet complexe.

A notre modeste échelle de Crolles et du Grésivaudan, nous avons notre responsabilité à assumer. L’énergie solaire et la valorisation de la biomasse sont les deux énergies renouvelables les mieux adaptées à nos territoires. Elles permettent aux populations de se réapproprier la production énergétique. Pourquoi hésiter, temporiser, tergiverser ? La question de l’énergie est vitale. Il serait illusoire de miser sur les seules économies d’énergie.

L’état de nos finances locales, nous permettrait, sans mettre en péril notre budget de fonctionnement, de mobiliser plus d’un million d’euros par an pour des projets à « effet de levier » et qui relèvent vraiment du développement durable : centrales énergétiques, véhicules électriques de transport en commun, participation significative dans des installations industrielles … Certes, il faudrait prendre des risques, mais c’est ce type d’actions dont faudrait débattre au conseil municipal et en réunions Agenda 21.

Dans le domaine économique, on voit aussi qu’il faut privilégier le lourd, le gros, le structurant – au mépris de la formule sympathique mais trompeuse de small is beautiful : ce qui fait la prospérité de la vallée, ce sont surtout (pas exclusivement, mais pour une très large partie) les grands sites industriels et de recherche qui tirent les autres activités : ST, Schneider, le CEA et ses myriades d’associés et sous-traitants … On peut rêver d’une situation à l’allemande ou à la suisse, avec des grosses PME exportatrices. La réalité n’est pas agréable à voir pour tous ceux qui, comme nous, militent pour la décentralisation et l’initiative des collectifs à taille humaine : le développement économique grenoblois, depuis plus de cent ans, est entraîné par quelques grandes entreprises innovantes et leaders. L’argent public mis sur ces entreprises s’est souvent révélé un bon investissement (cf les études réalisées sur le cas ST).

Le « développement durable » demande-t-il de remettre en cause ce schéma ? Sans doute pour ce qui concerne les aides systématiques attribuées sans discernement, telles que les réductions de charge sur les bas salaires et le crédit d’impôt recherche qui coutent plusieurs milliards d’euros et dont une large part relève de l’effet d’aubaine. Mais le développement durable ne se fera pas sans une approche industrielle de construction de grandes installations qui apportent des économies d’échelle. Et l’argent public est nécessaire pour susciter ces investissements.

28 juillet 2010

26 septembre 2009

Le génie Negawatt

Combien de discussions stériles aurions nous évité si negawatt était mieux connu !

Que faut-il privilégier ? Les économies d'énergie ou les énergies renouvelables ?
La réponse négawatt est celle du pluralisme : ET mieux que OU.

La réduction des gaz à effet de serre est un problème trop difficile pour être abordé d'une seule manière. Il faut les économies d'énergie ET les énergies renouvelables.

Negawatt propose trois approches complémentaires :
- la sobriété : arrêter de se gaver, limiter les besoins, commencer par supprimer le superflus
- l'efficacité : obtenir plus avec la même énergie
- les énergies renouvelables : produire de l'énergie sans produire de gaz à effet de serre.

Le génie négawatt, c'est de montrer que la décarbonisation de l'énergie est possible, et j'ose dire, relativement facile, sans remise en cause fondamentale de notre mode de vie ... à condition d'activer ensemble, en même temps, dès maintenant ... tous les leviers disponibles.

Le génie négawatt, c'est de jouer la complémentarité, la synergie, entre les solutions disponibles.

Je me demande si le terme négawatt n'a pas été choisi au début des travaux sur le scénario éponyme, traduisant une sympathie pour les approches dites de "décroissance". En fait, le scénario negawatt ne prone pas la décroissance. Mieux : il évite le débat et réconcilie les décroissants et les croissants technophiles.

Rapport 2006 : Scénario négawatt 2006.pdf

Mais le génie négawatt reste perfectible ! Car, tout de même, il faut le dire, néga ... est négatif ! Alors, je me risque à une suggestion : adieu négawatt et vive joliwatt !